Carnet de route

Randonnée facile à Oulmès
Le 16/10/2021 par Isabelle Furno et Nils Edeline
Ali, Nils et moi sommes arrivés de nuit à l’hôtel des thermes de Tarmilate. Le groupe nous attendait pour le dîner: Ghaouti, Anissa, Isabelle, Solange et Fouzia, et Sara nous rejoint samedi matin ainsi que Kebir notre guide. Nous roulons jusqu’au point de départ de la randonnée du jour sur la commune de Tiddas. Isabelle prend la parole : personne ne sera en difficulté, chacun évoluera à son rythme, on s’attendra. Entraide, solidarité, recherche du plaisir de la randonnée, sans la souffrance ou la performance, sauf celle que chacun s’impose à lui même. Isabelle annonce l’itinéraire, le kilométrage, les difficultés, les pauses. Nous pénétrons dans la forêt de liège qui abrite des hommes qui y vivent, travaillent, exploitent son potentiel. Le liège bien sûr, la récolte laisse le tronc des arbres nu, il se colore d’un rouge sang. Les troncs sont comme à vif et je m’interroge sur leur souffrance. Chaque saison les arbres sont marqués à la peinture rouge et sont comme déshabillés. L’écorce épaisse est pressée stockée, séchée. Cette matière noble est disposée en tas qui forment des lignes près des habitations, plus bas dans la plaine. La forêt est aussi le domaine des bergers, des troupeaux de brebis et de chèvres. Le premier berger que nous croisons est couché sous un arbre, le second est monté sur un âne. Tout à l’heure nous cheminerons sous les arbres en suivant les traces du passage des troupeaux. Au silence succèdent le bruit et l’agitation. Nous sommes au milieu d’une battue aux sangliers, pris entre les rabatteurs et les chasseurs. Les chiens suivent les hommes, chacun sa fonction. Je croise un petit garçon les yeux brillant d’excitation. Est-ce la chasse ou d’être enfin parmi les hommes! Je pense à mon frère lorsqu’il suivait mon père à la chasse, le roi n’était pas son cousin! Les cris, les aboiements, les courses et le mouvement nous entourent un moment. Nous nous éloignons vers le fond du vallon pour franchir une crête autour de laquelle nous tournerons durant le reste de la journée. Le versant est hérissé de palmiers doum jusqu’au sommet. L’autre côté est à l’ombre, l’air y est frais, nous glissons sur une pente tapissée de feuilles de chêne, le sol a été retourné par les hardes de sangliers. Le bruissement des feuilles, la fraîcheur de l’ombre et l’eau effacent l’effort de la montée sous le soleil. Sous les chênes nous longeons et contournerons la falaise par un chemin derrière une ferme défendue par les chiens. Au fond de l’oued, la rivière coule encore mais faiblement entre les rochers, une jeune femme au foulard vert anis, habillée de rouge, souriante, finit sa lessive, elle rince des bidons et recharge son âne. Encore une montée et une descente et nous sommes sur une terre à blé perchée. Plusieurs fermes indiquent la présence d’une communauté d’agriculteurs, éleveurs et forestiers (céréales, vaches, moutons, chèvres, poules et dindes et liège). À nouveau les chiens défendent le périmètre de chaque habitation en aboyant pour la forme! Les fermes sont en briques de terre rouge, la terre isole aussi le toit. Sous le chêne ancestral notre pique-nique est partagé comme le pain et le thé à la menthe fournis par les villageois. La pause déjeuner est prolongée par une petite sieste. Nous reprenons la marche à travers une jolie pinède, jonchées de pommes de pin, le sol est moelleux et odorant, un crâne de singe m’intrigue…. Encore un effort et nous rejoignons la route. Le retour est joyeux. La soirée débute par une partie de 6 qui mange et se poursuit avec un bon dîner. Merci Isabelle pour cette belle journée qui a fatigué nos corps et apaisé nos âmes. Demain sera un autre jour …
Réveil à l'hôtel, préparation rapide avant de descendre pour le petit déjeuner et là erreur de débutant : Un repas trop copieux ! Et contrairement à la veille, où il y avait un peu de route avant le point de départ qui permettait de digérer un minimum, ce dimanche nous commençons notre randonnée depuis notre gîte. J'en bave toute la première moitié de la marche, d'autant plus que les difficultés sont situées au début et vers la fin de notre parcours. Nous sommes une de moins ce dimanche matin, Anissa a préféré écouter son corps et se ménager.
Nous voilà donc partis et déjà nous attend un super point de vue sur les vallées environnantes avec une légère brume pour magnifier leur beauté. Nous croisons des cactus ravagés par la cochenille mais qui pour certains reprennent un peu vie avec de nouvelles pousses pleines de couleurs. Je maudis mon ventre trop plein quand il faut grimper le long d'un champ de lavande, mais heureusement ce fut la dernière petite ascension avant d'être sur du plat avec un panorama magnifique.
Les animaux étaient encore très présents : moutons, chiens gardant des fermes ou errant dans les collines, vaches paissant tranquillement, pic-vert méfiant et le bouquet presque final : la ferme aux oiseaux. Des oies, des poules, des coqs, des perdrix, des paons, des pintades, et le plus bel oiseau de tous : le sanglier... Pardon ? Ah oui, dans la ferme aux oiseaux il n'y a pas que des oiseaux mais aussi un enclos à sangliers. D'ailleurs c'est à côté de cet enclos que vient mon salut : l'occasion de faire une micro-sieste afin de laisser enfin le temps à mon corps de digérer.
La reprise de la marche fut donc beaucoup plus facile pour moi et je profitais bien plus des paysages, bien qu'à cette époque de l'année tout est sec, des teintes ocres parsemées du vert des arbres. Nous descendons une route jusqu'à la source Sidi Ali avant de remonter à travers champs vers Tarmilate. Nous passons dans les restes d'un bidonville rasé qui ne correspondait sans doute plus à la vision moderne que les autorités ont de cet endroit. Enfin nous arrivons à la route toute neuve permettant aux camions de l'usine de mise en bouteilles des eaux locales de partir dans tout pays les distribuer.
Nous partageons un repas à l'hôtel, pour ceux qui avaient faim après la marche, et repartons vers Casablanca à travers ces magnifiques paysages montagneux que nous avions manqués en arrivant de nuit.